Synopsis : Enceinte à 16 ans, Camille se retrouve placée dans un centre maternel par le juge des enfants. Sevrée d’une mère aimante mais toxique, elle se lie d’amitié avec une jeune mère immature, et se débat contre l’autorité d’une éducatrice aussi passionnée que désillusionnée.
| Réalisateurs : Lucie Lerat-Gersant, François Roy |
| Actrices : Lucie Charles-Alfred, Pili Groyne, Romane Bohringer |
| Durée : 90 minutes |
| Genre : Drame |
| Pays : France |
| Date de sortie : 22 février 2023 (salles) 9 août 2023 (DVD) |
Mention Spéciale de la Jeunesse au Festival du Film de Locarno, Petites est la première réalisation du duo Lucie Lerat-Gersant et François Roy. Le film est sorti il y a quelques mois sur les écrans français dans un trouble silence, ne trouvant pas sa place au cœur d’une programmation de plus en plus mercantile et nauséabonde.
La sortie DVD du film est alors notre carte à jouer pour rattraper cette célébration en provenance de Locarno.
L’article prendra la forme suivante :
I) La critique de Petites
II) Les caractéristiques techniques de l’édition DVD
I) La critique de Petites
Camille est une adolescente, femme en devenir.
En pleine nuit, sa mère contacte les pompiers, Camille a essayé d’avorter avec un étrange mélange de cannabis et de médicaments, une tentative supervisée par sa maman.
Une fois à l’hôpital, l’état de Camille, et du fœtus, stabilisés, la justice décide de placer l’adolescente dans un foyer pour très jeunes mères, un espace où grossesse et jeunes enfants se croisent, où les éducateurs cherchent à la fois à accompagner les futures mères et à trouver une sortie du bourbier social et familial dans lequel ces dernières sont empêtrées.
Les premiers jours sont insoutenables, les complaintes d’une mère-copine lointaine terribles, la perte de repères totale.
Un long chemin de redécouverte d’identité, de la société, des autres et du corps se met en marche.
Julie-Lerat Gersant, accompagné par François Roy, nous confient une histoire qui dans sa trame, déconcerte, entre la mise en scène de son introduction peu inspirée mais percutante, et le ton que prend l’œuvre, ouvrant les sentiers d’un cinéma social à bout de souffle, il y avait de quoi se questionner sur le nombre de portes ouvertes que le film risquait d’enfoncer.
Puis, très rapidement, un mouvement parallèle semble traverser le cadre, une vision alternative d’une soupe que nous pensions connaître dans ses moindres saveurs.
La caméra de la cinéaste est proche sans jamais être intrusive. Elle est une invitation pour le spectateur à intégrer une cellule de vie, une organisation, nous perdons la distance habituelle et échappons au voyeurisme.
Un savant travail d’équilibriste s’orchestre.
Il y a ici autant du regard de Kechiche, sur le quotidien, que celui de Jeanne Henry, pour définir l’humain dans ses latéralités intimes, et les méandres institutionnels.
Et même si le mot d’ordre en terme de jeu d’acteurs semble être « Adèle Exarchopoulos », la cinéaste a réussi à faire naître de véritables talents, longeant des interprétations bis repetitae mais avec assez de distances pour créer un cheminement personnel.
Nous sommes captivés par le regard de Pili Groyne, les dynamiques qu’elle réussit à incarner, et ce, tout particulièrement lorsque son interprétation rencontre celle de Lucie Charles-Alfred, actrice supernova.
Le récit avance rapidement et rien n’y est superflu, la proposition construit de très nombreux personnages et parvient à donner une véritable profondeur, un vertige, face à la misère, l’abandon, et la difficulté des mères adolescentes de trouver une voie pour évoluer.

Il est particulièrement intéressant de suivre la réflexion autour de l’individu en construction qui se fait dépasser par sa propre création.
Comment pouvons nous transmettre lorsque nous apprenons tout juste ?
Face à cette interrogation ricoche des existences et des expériences toutes aussi différentes les unes que les autres.
Une observation ouvrant l’institution qui les accueille, une observation d’une ampleur stupéfiante qui au fur et à mesure de ses déambulations devient un véritable petit miracle de mise en scène, de lecture de l’humain, des doutes et du temps qui ne cesse de progresser, du temps que l’on ne peut arrêter, que l’on se doit d’accepter.
D’enfants à femmes, la case de l’adolescence y est obscure, friable, dérobée.
A travers les doutes, les blessures et les secrets, Petites met en difficulté ses personnages, les confronte à leurs vies, afin de suivre un chemin psychanalytique bienveillant, à la recherche de pièces manquantes pour construire une base stable pour la constitution de la personne.

En collaborant avec Superpoze, musicien électronique, la réalisatrice approche également une dimension sensible fascinante, va au-delà des mots constitue tout un espace de ressentis pour accompagner la psychologie des personnages, une mise en sonore qui ricoche à merveille avec la proximité de la caméra, à la rencontre d’un subconscient, à la quête des intimes aveuglements.
Petites, bien que déconcertant dans son accroche, est une œuvre qui se doit d’être découverte, traitant d’un sujet que nous pensions connaître, et que nous découvrons tout juste finalement, traversé des tendres et justes regards de Lucie Lerat-Gersant et François Roy, cinéastes à suivre tant la singularité de leurs sensibilités émeut et vient à nous faire explorer certains espaces personnels que nous pensions perdus.

II) Les caractéristiques de l’édition DVD
Image :
Malgré une unique édition DVD, et l’inexistence du format Blu-Ray, Petites s’en sort vraiment très bien et use de tous les ressorts de son support pour aller au plus proche d’une expérience HD.
Le niveau de détails est soutenu, les contrastes et couleurs se répondent bien et apportent un bon rendu.
La restitution du film est très bonne.
Son :
Deux pistes sont disponibles, 2.0 et 5.1, à savoir que la grande différence se joue sur la spatialisation de la bande son de Superpoze, qui vient véritablement nous porter et nous guider au cœur de la proposition.
Hormis la bande originale, le tout reste très frontal, et l’équilibre est sensiblement équivalent avec des fréquences bien balancées, ne se cannibalisant pas et offrant une belle expérience.
Suppléments :
Un unique supplément est proposé, un entretien avec la réalisatrice et le réalisateur François Roy. Un supplément de 25 minutes, bien mené, venant à reprendre le chemin de Lucie Lerat-Gersant jusqu’à la réalisation, la rencontre des cinéastes, la naissance du film, les actrices et le tournage.
Un très bon point pour continuer la proposition du film.

Avis Général :
Sorti dans l’indifférence, malgré sa Mention Spéciale à Locarno, Petites est un film sur l’adolescence et les foyers d’accueil qui esquive toutes les impasses d’un genre et vient véritablement questionner sur la construction interne du paysage humain de chaque individu.
L’édition DVD accompagne son travail d’une belle manière, avec une image poussée pour le support DVD, et une belle spatialisation de la bande originale, faisant jaillir l’hypnotique composition de Superpoze.
De plus, nous nous attendions à des suppléments moins travaillés, et nous nous retrouvons face à une très intrigante et complète conversation avec les cinéastes.
Pour découvrir Petites :
– https://www.esc-distribution.com/enfant-jeunesse-et-famille/8994-petites-dvd-3701432018331.html


Laisser un commentaire