Synopsis : Anne est une brillante avocate, spécialisée dans la défense des mineurs victimes d’abus et des adolescents en difficulté. Elle habite dans une grande villa sur les hauteurs de Paris avec son mari, Pierre, et leurs deux filles. Cependant, l’harmonie dans sa famille est perturbée par l’arrivée de Théo, fils de Pierre né d’un précédent mariage, qui emménage chez eux.
| Réalisateur : Catherine Breillat |
| Acteurs : Léa Drucker, Samuel Kircher |
| Genre : Drame |
| Durée : 104 minutes |
| Pays : Français |
| Date de sortie : 13 septembre 2023 (salles) / février 2024 (Blu-Ray) |
2023 a marqué une véritable renaissance de Catherine Breillat dans les regards cinéphiles tout autant avec la sortie de son nouveau film L’Eté Dernier, qu’avec la parution du livre d’entretiens incroyable Je Ne Crois Qu’En Moi.
2024 prolonge cette exhumation de carrière et voit débarquer L’Eté Dernier en Blu-Ray mais également la filmographie de Breillat, restaurée et éditée, par Le Chat Qui Fume.
Nous commençons ainsi le voyage Breillat avec l’édition Blu-Ray de L’Eté Dernier :
I) La critique de L’Eté Dernier
II) Les caractéristiques techniques de l’édition Blu-Ray
I) La critique de L’Été Dernier
Après pas moins de dix ans d’absence derrière la caméra, l’inattendue et irrévérencieuse Catherine Breillat a fait son retour, et pas de n’importe quelle manière, en montant les marches cannoises pour une sélection en compétition avec L’Été Dernier.
L’éternelle vraie jeune fille sonde et perfore un terrain, comme souvent, instable, criant les errances sourdes d’une société qui s’aveugle de concepts factices, de croyances geôles. Une société qui oublie la profonde nature humaine, celle de la chair et des hormones, celle des pulsions et tentations. Breillat, elle, envers et contre tous, seule au monde, a toujours cultivé le fruit défendu pour mieux l’ingérer.
Avec ce dernier film, il y a la tentation tant celle de la belle-mère, vers son beau-fils adolescent, flamme nouvelle, que celle du beau-fils, vers sa belle-mère, île inaccessible.
Il y avait de quoi s’inquiéter, tant par les longues années qui séparent Breillat de la caméra, après quelques films hasardeux, mais aussi par ce cadre familial bourgeois tenu par Léa Drucker que nous redoutions d’être égocentré et soporifique.
Pourtant il s’avère que L’été Dernier est une belle réussite, un essai hors du temps, qui hérite tout autant du Théorème de Pier Paolo Pasolini, que de la rance sulfureuse envoûtante de sa cinéaste.
La photographie, saisie par Jeanne Lapoirie, directrice de la photographie à qui l’on doit les ravissements rétiniens de Eastern Boys ou encore la frontalité, la hargne, des derniers films de Catherine Corsini, propulse le long-métrage sur une toile impressionniste dans laquelle le chaos ne cesse de répandre sa bile, serpent qui s’immisce dans le jardin d’Eden.
Un paradis perdu qui ne cesse de déconstruire les bienveillances, vitrines perçues par le monde extérieur, pour afficher une desquamation interne, un retournement de la chair, sous le poids de l’artifice.
Catherine Breillat joue avec une brèche difficilement perceptible, l’écartèle et plonge dans ce gouffre fascinant où le duo Léa Druker/Samuel Kircher est incandescent, tout aussi attirant que vénéneux, où la moindre scène s’engouffre dans nos consciences jusqu’à toucher les reliefs sensibles de nos existences passées, jusqu’à toucher les pensées que nous ne désirions pas développer, sur nos certitudes liées au temps, à l’âge et à l’absurde sagesse des rituels, par peur.
Oui, par peur. Par peur de voir se dérober sous nos pieds toute une construction sociétale nauséeuse , où le confort l’emporte sur la raison, où dans les facilités nous élevons nos cages, où la représentation l’a emporté sur la vie.
L’été Dernier filme cette sortie, cette échappée du cadre, difficile, risquée, avec grandeur et humilité, avec acidité et âpreté.
Un savant jeu d’équilibriste qui aurait très rapidement oeuvrer en chute libre. Remarquable.

II) Les caractéristiques techniques de l’édition Blu-Ray
Image :
1080p AVC // 16/9 // Source : Numérique
Le master proposé est d’une finesse envoûtante, le traitement de l’image permet une compréhension détaillée et profonde de l’environnement, travail ricochant sur les aspérités des visages, faisant naître dans nos yeux tout autant l’inconfort que la fascination, désir traversant chez Breillat.
La gamme colorimétrique a, elle aussi, été finement pensée, modulée, tout particulièrement les tons verts, plus ou moins profonds, accompagnant tant les désirs que les rancoeurs. Entre peinture et photographie, entre corps et esprit, le délitement de la bourgeoisie est terrifiant
Nous plongeons dans cette trouble promenade dont la photographie de Jeanne Lapoirie trouve ici un respect majestueux.
Son :
Piste Dts-HD Master Audio 5.1 VF :
A l’image du master image, le master son est particulièrement délicat, travaillant savamment l’espace sonore et les ambiances, tout en laissant la voix à la juste place pour ne pas sortir de ce cocon tout aussi doucereux que douloureux.
La spatialisation est une réussite prolongeant le cadre image aux quatre coins de la pièce et englobant nos esprits au rythme du vent, des herbes balayées, du fracas des larmes, des oiseaux de l’aube mais aussi créatures nocturnes invisibles.
Suppléments :
- Scènes du film commentées par Léa Drucker (21′)
Un retour sur image plutôt intime où l’on se plaît à continuer notre redécouverte de Léa Drucker, actrice que nous avions dû mal à apprécier.
Son appréciation sensible, mesurée et précise, avec un rythme pour le moins tout aussi chaleureux que réservé est particulièrement intéressant.
L’actrice revient sur des souvenirs de tournage, le travail avec Breillat, avec Kircher, mais aussi son travail du jeu.
- Essais casting de Samuel Kircher et Romane Violeau (13′)
Intrigant supplément, document qui prolonge le jeu juvénile tout aussi inquiétant que magnétique de Kircher.
Le retour sur Romane Violeau bien qu’intéressant, reste périphérique.
- La Leçon de cinéma de Catherine Breillat – Festival international de Films de Femmes (2001, 16′)
Une leçon de cinéma particulièrement envoûtante où la cinéaste revient sur son tortueux parcours de vie.
Le supplément est daté et aujourd’hui, si vous souhaitez pleinement plonger dans le parcours fascinant de Breillat, et son rapport au monde, il ne vous reste plus qu’à vous diriger vers son entretien fleuve, qui est véritablement un immense témoignage humain : Je Ne Crois Qu’en Moi. (https://capricci.fr/wordpress/product/catherine-breillat-je-ne-crois-quen-moi/)

Avis général :
Catherine Breillat est toujours aussi incisive, incendiaire, déniche les recoins sulfureux pour déclencher un dynamitage de la société moderne, des non-dits aux cris des corps.
L’Eté Dernier est en cela une redoutable réussite, une continuité tranchante et sensible, porté par un fascinant duo Drucker/Kircher qui restera longtemps dans les rétines témoins de ce spectacle.
L’édition Blu-Ray, quant à elle, est techniquement une belle réussite.
Les suppléments, quant à eux, et bien qu’intéressants auraient gagné à être plus nombreux.


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