« Le Grand Amour Du Comte Dracula » réalisé par Javier Aguirre : Critique et Test Blu-Ray

Réalisateur : Javier Aguirre
Avec :  Paul Naschy, Haydee Politoff
Genre : Horreur
Pays : Espagne
Durée : 83 minutes
Date de sortie : 1973 (salles) // mars 2024 (Blu-ray)

Synopsis : Vers la fin du XIXème siècle, dans la Carpate orientale, en Roumanie – Après avoir traversé le col de Borgo, un carrosse perd une roue ; les chevaux, effrayés, tuent accidentellement le cocher avant de s’enfuir. Les cinq passagers, quatre femmes (Senta, Karen, Elke et Marlene) et un homme (Imre Polvi), se retrouvent isolés en pleine forêt. Imre convainc les passagères de se diriger vers un ancien sanatorium, afin de trouver de l’aide.

En cette année 2024, Le Chat Qui Fume braque sa patte de l’autre côté des Pyrénées, en terres espagnoles.
La fournée en présence a dans son sac reliques et oubliés du cinéma d’exploitation.
Nous vous parlions dernièrement de l’inespéré La Chevauchée Des Morts-Vivants, classique introuvable depuis belles lurettes, et aujourd’hui nous abordons le cas de Le Grad Amour Du Comte Dracula, film aux élans de la Hammer avec toute l’outrancière sidérante des propositions espagnoles, qui n’a connu en France qu’une seule et unique projection, l’année de sa sélection au Festival Fantastique de Paris, en 1973.

La critique de Le Grand Amour Du Comte Dracula

Javier Aguirre fait partie de ses noms tout aussi obscures qu’intrigants du cinéma d’exploitation espagnol, moins mis en avant que les offrandes italiennes, refermant néanmoins de bien belles outrances cinématographiques. De la sorte, le cinéma fantastique espagnol touche à certaines recettes lancinantes pour leur donner des dimensions singulièrement crasses et transperçantes.
Le cinéaste espagnol, également connu pour Le Bossu De La Morgue, a été un réalisateur touche à tout mais n’ayant atteint que son firmament que lorsqu’il laissait son esprit mettre en scène des contes macabres.

Ici, le cinéaste espagnol prend les codes centraux de l’écrit de Bram Stoker et retravaille toute une mythologie à travers un cinéma à la fois héritier des studios Hammer et des gestes filmiques artisanaux espagnols rappleant l’erotico-gothisme grotesque et hypnotique de Jess Franco.
Aguirre est accompagné par Paul Naschy au scénario. Pour rappel, Paul Naschy est une figure de proue du cinéma fantastique espagnol. Un visage et un corps qui ont foudroyé bon nombre de rétines avec des films tels que Les Vampires du Docteur Dracula, Dans Les Griffes Du Loup-Garou ou encore Dracula Contre Frankenstein. L’homme est expert en interprétations macabres à tendance bis.
Dans cette collaboration entre Aguirre et Naschy naît une sorte de géniale synthèse de quatre décennies de cinéma de monstres.

Le Grand Amour Du Comte Dracula s’offre une compilation de tous les raffinements vampiriques.
Entre ritualismes, scènes de lesbianisme, sacrifices, tortures et romantismes suaves, toutes les ficelles du genre sont convoquées et leurs présences permettent finalement de meubler un récit particulièrement creux, avec des acteurs plus ou moins convaincants.
Ainsi le récit est ponctué de séquences particulièrement croustillantes, aux ambiances toutes aussi grotesques qu’hypnotiques et aux confrontations gores particulièrement réjouissantes.
Lorsque le long-métrage est sur, que les mécanismes se retrouvent paramétrés, la proposition de Javier Aguirre devient un véritable plaisir bis, de mauvais goût certes, mais d’une portée enivrante extraordinaire.

Le Grand Amour du Comte Dracula joue sur les archétypes, s’amuse à baigner dans sa marinade ultra-bis et quitte la cohérence de sa narration au profit de scènes particulièrement marquantes que cela soit à travers la plastique enivrante, celle des corps en mutation, ou bien par son travail des enveloppes charnelles, où la rétine s’attarde et magnifie les courbes jusqu’à ouvrir la chair.
Une référence pour les amoureux de l’esthétique Hammer et aficionados de cinéma d’exploitation espagnol.

Les caractéristiques techniques de l’édition Blu-Ray

Le film de Javier Aguirre rejoint la collection Scanavo de l’éditeur.
Le visuel de l’édition reprend l’affiche originale, les dynamiques ont été retravaillées afin de donner un certain punch aux couleurs.
Le verso reprend le style visuel de Le Chat Qui Fume et met en avant de belles scènes de la proposition, et soyez en certains, il y a bien plus alléchant au sein du long-métrage.
La proposition de Frédéric Domont en terme de création graphique est une nouvelle fois une réussite.

Image :

 1920×1080/23,976p // Format 1.85 d’origine – Version intégrale

De ce que nous avons pu observer le master en présence paraît assez proche de l’édition Vinegar Syndrom.
Le rendu est assez changeant offrant un traitement pellicule particulièrement organique, marqué par des griffures, pocs, flous et craquèlements.
Cependant, la proposition atteint aux instants phares de la réalisation de Javier Aguirre des moments de grâce appuyés par un piqué assez riche, et des couleurs saturées. Les détails se creusent, la profondeur se ressent, les maquillages, effets spéciaux et textures ambiantes viennent saisir la rétine.
On sort de la découverte en oubliant certaines errances de restauration marqué par des séquence ritualistes où le master offre de bien beaux résultats.

Note : 6.5 sur 10.

Son :

Espagnol DTS-HD MA 2.0

La proposition 2.0 de Le Grand Amour Du Comte Dracula est marquée par quelques pocs, craquements et saturations dans les voix les plus aiguës.
Néanmoins le tout reste pour le moins stable, trouve un certain équilibre où les accompagnements musicaux, quant à eux, se propulsent dans une dynamique plus contrôlée et puissante.

Suppléments :

  • Souvenirs de Christophe Lemaire :
    Christophe Lemaire débute le supplément en expliquant qu’il pensait avoir vu le film durant les années 70, mais qu’il s’agissait finalement d’un souvenir travesti. Avant de triturer le cas Le Grand Amour Du Comte Dracula, il aborde les affres du temps et de la mémoire.
    Puis il poursuit autour du film en revenant sur la carrière de Paul Naschy et dessine le spectre du cinéma fantastique espagnol.
    Il conclut le supplément en revenant sur la carrière de Haydée Politoff, modèle de La Collectionneuse d’Eric Rohmer, et qui a connu un parcours à travers le cinéma bis européen.
  • Film-annonce

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