Jason Chan, avocat révolté par le laxisme d’une justice qui, faute de preuves, se montre clémente envers les malfrats, et notamment de dangereux trafiquants de drogue, décide de faire justice lui-même. Dans cette quête dangereuse, il va trouver une aide précieuse en la personne de Cindy, une spécialiste en arts martiaux.

Si nous ne l’avions pas vu venir de manière si directe, il faut aujourd’hui reconnaître que Le Chat Qui Fume, éditeur longtemps estampillé giallo, a ces derniers mois su se parer de nouveaux horizons allant grappiller ce que nombre d’entre nous, cinéphiles voraces, n’espérions plus, un voyage en direction de Hong Kong et ses polars infusés aux arts martiaux.

Bien qu’il s’agisse d’un horizon qui a bien souvent titillé notre curiosité, le cinéma HK est encore aujourd’hui, du côté de Kino Wombat, un El Dorado tout juste rencontré, un espace à explorer de manière frénétique.

Arrêt du jour : Une Flic De Choc réalisé par Corey Yuen.

Des Justiciers Dans La Ville, A Hong Kong Mandales Story

Jason Chan est un avocat qui aimerait que la loi soit la seule voie que la Justice se doive d’emprunter. Cependant, à Hong Kong, les triades sont légions et savent comment agir pour constamment se sortir d’affaires.
Lors de la tenue d’un procès, et malgré l’impasse judiciaire, Maître Chan tente néanmoins de faire tomber un gros bonnet par le biais du témoignage crucial d’un père de famille.
Malheureusement, ce témoin ne se rend pas à l’audience, et pour cause, il a été liquidé, lui et sa famille toute entière, sauvagement.
Face à une telle situation, Jason Chan ne peut plus tenir, il bouillonne et déborde de colère.
La nuit, laissant sa robe d’avocat dans son placard, il fait justice lui-même.
Sur sa route, la dernière flic intègre du pays se dresse…

Une Flic De Choc sort en pleine nouvelle vague hongkongaise mais joue sur la périphérie, à cheval sur la bordure, préférant les formes classiques du cinéma d’exploitation à la folie nihiliste et annihilante, signature que l’on trouve tant chez Tsui Hark avec L’Enfer Des Armes que Patrick Tam avec Nomad.
Une position d’expression cinématographique à l’équiibre dangereux qui parvient à ne pas relayer la proposition dans une lecture bis reptitae de cinéma d’action hyperactif et grossier.
Au contraire, dans sa recette croisant film policier, cinéma d’arts martiaux et questions de corruption, le cocktail prend à merveille, et ce, même avec un récit maigrelet, jouant sur les codes du vigilante movie et regorgeant de clins d’œil à Un Justicier Dans La Ville.
Le regard ne flanche jamais, secoué par des distributions de mandales millimétrées et un montage savamment rythmé.
C’est le mirage d’une forme qui laisse penser à un désert du fond, et pourtant cela serait se fourvoyer.

Certes, les chorégraphies sont impressionnantes et les angles de caméra saisissent les corps en mouvement avec talent.
Certes, les démonstrations tant de Cynthia Rockroth que de Yuen Biao sont addictives.
Mais en réalité, ces séquences d’action portant l’histoire principale, et bien, très rapidement, on s’en moque.
On s’en moque tout simplement car ce qui tient en haleine par-delà les arts martiaux, c’est la toile de fond, celle de l’épée de Damoclès qui plane sur Hong Kong : sa rétrocession à la Chine.
Le cinéaste parvient assez justement à capturer cette urgence, cette nécessité d’agir avant l’engloutissement, cette peur d’un lendemain incertain. Il y a tout autant le spectre de la reine d’Angleterre que la main gloutonne d’un communisme dictatorial, entre système institutionnel anglo-saxon et coutumes locales, un véritable choc identitaire se fait ressentir.
Une dimension assez diffuse, légère, qui prend un tout autre élan selon le montage du film.
D’une part, un montage HK à la clôture nihiliste dans la lignée de la tradition de la nouvelle vague hong-kongaise, dévorant tous ses personnages, et, d’autre part, un montage chinois, qui lui, n’a pas peur de faire triompher, les héros dans leur quête, l’institution et l’ordre étatique.
C’est d’ailleurs d’un montage à l’autre que le film passe de brûlot de seconde zone saisissant à film bis potache, à tendance moraliste.

Plus justement nommé Righting Wrongs à l’international, le titre français, Une Flic De Choc, porte à confusion de par sa nomination hexagonale. Oubliez cette appellation pompeuse, dépassez l’artifice douteux.
Ici, sachez tout d’abord que la flic, bien qu’interprétée par Cynthia Rothrock est un personnage secondaire, si ce n’est tertiaire dans cette intrigue s’enfonçant dans une société hong-kongaise pourrissante. Elle n’a de fonction dans ce premier opus que de dynamiser l’intrigue avec de séquences d’arts martiaux soutenues.

Dans cette proposition de cinéma, il est question de justice de rue par un avocat désabusé.
Au coeur de la rétine de Corey Yuen, il est question de dépasser le droit, par la force des poings.
Bref, il est question de renvoyer les crapules six pieds sous terre, quitte à se hisser à bord d’un hélicoptère en plein vol, quitte à finir derrière les barreaux.

Une Flic De Choc est une petite réussite, loin d’être un indispensable, il s’agit d’une proposition aussi divertissante que révélatrice d’un pays en proie à une crise politique et civilisationnelle vertigineuse.
Ça bastonne, expédie des coups de tatanes à la chaîne et accepte sa violence frontalement sans faire de chichi, sans essayer de s’excuser par le biais d’un humour balourd.
Terriblement cool.

Les caractéristiques techniques de l’édition Blu-Ray

Le Chat Qui Fume continue sur sa lancée et sa belle collection Scanavo avec fourreau.
Pour ce nouveau titre HK, l’éditeur continue sa collaboration avec Studio Stella et offre un visuel implacable. C’est magnifique !
Pour le reste, visuel arrière et scanavo, il faut s’en remettre aux mains tant appréciées et appréciables de Frédéric Domont.

Image :

Le Chat Qui Fume propose ici un excellent master provenant d’une source de très bonne qualité, possiblement le négatif original.
Le niveau de détails est poussé, les plans d’ensemble comme les gros plans fourmillent d’informations et la texture pellicule est conservée.
Un constat qui vient à être rehaussé de par un travail des couleurs particulièrement précis et tranchant, abandonnant l’étalonnage fatigué d’un ancien DVD. Les dynamiques sont pop mais conservent merveilleusement les perspectives originales, celles avec lesquelles l’oeuvre a été pensée.

Le cadre est stable. L’image est parfaitement nettoyée.

Une belle surprise.

Son :

DTS-HD MA 2.0 Cantonais (montage HK) et mandarin (montage chinois)

Bien que correctement balancé, sans cannibalisation des fréquences, certaines dynamiques dans les aigus viennent à saturer.
L’ensemble ressort plutôt bien, avec même quelques appréciables rondeurs sur la bande originale.

Suppléments :

Moins chargé en matière de contenu que l’édition de Une Flic De Choc 2, l’édition en présence reste néanmoins plutôt plaisante, contenant tout d’abord les deux montages sur deux disques mais aussi :

• Présentation d’Arnaud Lanuque (15 mn)
Arnaud Lanuque propose une présentation complète et pleine de références pour aborder Une Flic De Choc.
Il revient tout d’abord sur la vague du polar kung-fu qui succède au mouvement de la comédie kung-fu.
Puis, ce dernier décrypte toute une industrie cinématographique avec pour toile de fond la nouvelle vague hongkongaise et le couperet de la rétrocession à la Chine, le tout par le prisme de la Golden Harvest, Corey Yuen, Yuen Biao et Cynthia Rothrock. Superbe.

• Interview archive Yuen Biao (17 mn)
L’acteur principal, mais également producteur, revient sur son expérience du film, le choix de Cynthia Rothrock, le caractère périlleux de certaines cascades et la place particulière du film dans le parcours de ce dernier. Intéressant.

• Fin alternative (1 mn)
Une étrange clôture sous forme de farce d’un cynisme corrosif. À regarder.

• Film annonce

Pour découvrir Une Flic De Choc en Blu-Ray :
https://lechatquifume.myshopify.com/products/un-flic-de-choc?srsltid=AfmBOop1WwUD0p4sA7qDlvfA4F1oYsBVsCTnweXMOXlWSshFQqdbXLnx