Pearl : Critique et Test Blu-Ray

Synopsis : Pearl habite dans une pension de famille en pleine campagne. La jeune femme se sent piégée et isolée dans cette ferme familiale où elle doit s’occuper de son père malade et comateux tout en supportant une mère autoritaire. Pearl rêve d’une vie glamour comme dans les films qu’elle regarde. Une série d’événements va doucement la faire sombrer.

Réalisateur : Ti West
Acteurs : Mia Goth, David Corenswet
Genre : Drame, Horreur
Durée : 102 minutes
Pays : Etats-Unis
Date de sortie (Blu-Ray) : 16 août 2023

Presque un an après la sortie de X dans les salles françaises, mais il y a déjà belles lurettes chez l’Oncle Sam, Pearl, son prequel surgit dans nos salons oubliant les cinémas.
Un choix étrange pour une œuvre qui aura été encensée tant par le public que par la presse aux US allant jusqu’à recevoir les éloges d’un certain Martin Scorsese.

Nous avons mis les mains sur une copie Blu-Ray du film et nous aborderons ce dernier en deux temps :

I) La critique de Pearl

II) Les caractéristiques techniques de l’édition Blu-Ray

I) La critique de Pearl

Pearl débute dans l’obscurité, un air de musique résonne, des portes s’ouvrent, un paysage bucolique se dévoile.
Nous ne connaissons pas le film mais les lieux reviennent à notre bon souvenir. X s’esquisse et nous nous remémorons la vieille bâtisse défraîchie et sa grange en triste état.
Entre le premier film réalisé par Ti West et ce Pearl six décennies se sont écoulées, mais les lieux restent les mêmes.
L’action se déroule en 1918, et la vieille propriétaire meurtrière est aujourd’hui une belle et jeune femme rêvant de gloire, de danse et de cinéma. Cependant, les rêves sont bons pour les autres, ceux qui ne sont pas retenus par leurs obligations.
Dans ce monde visuellement parfait, aux apparats de Yellow Brick Road, où Pearl semble être Dorothée dans Le Magicien D’OZ, l’enfermement du personnage campé par Mia Goth semble insoutenable.
D’un côté un père tétraplégique, de l’autre une mère autoritaire et conservatrice et enfin un mari qui ne donne pas de nouvelles depuis le début de la Guerre, œuvrant quelque part en Europe dans les tranchées ou enterré sous des mètres de fange et de vermines.

Dans cet étau cauchemardesque au visuel de conte de fée, Pearl sous ses airs de jeune fille innocente, laisse s’échapper le mal, progressivement, envahissant le cadre jusqu’à le plonger dans les ténèbres.
D’une innocente oie transpercée et donnée aux crocodiles, en passant par l’adultère puis le meurtre, sa manière de dépasser, de contenir, la pression que son environnement effectue sur elle crée des failles, des interstices où son fond d’âme, dégoulinant de violence, cherche à s’exprimer, à vivre librement, une libération qui aura le goût du sang, de la charogne, l’odeur des tripes et des asticots.
Pearl dévoile sa nature première, Pearl réclame sa liberté.

Ti West et Mia Goth, qui l’accompagne à l’écriture, s’éloignent du cinéma de rednecks du premier film, s’émancipent de Massacre À La Tronçonneuse, et jouent sur le carcan tant d’Alice Au Pays Des Merveilles que du Magicien D’Oz, ils fondent un cauchemar enchanteur et ne cessent de contrer les voies que nous pouvons dessiner en tant que spectateur.
Tout l’intérêt de ce Pearl est alors de se rappeler des éléments distillés dans X et de chercher, de crapahuter dans le cadre pour parvenir à lier ce que nous savons avec ce que nous découvrons. Le duo s’amuse à parsemer le parcours d’impasse, tout en gardant pourtant un développement narratif assez caricatural si ce n’est guignolesque.

Dans le premier acte de cette trilogie, qui s’achèvera avec le futur Maxxxine, nous trouvions le rythme bien trop en dents de scie, travaillant l’atmosphère et oubliant quelque peu l’horreur promise.
Avec Pearl, le constat est sensiblement identique, mais il y a cette fougue, cette frénésie dans le jeu de Mia Goth qui envahit tout notre espace mental, réussissant à donner une dynamique complètement hystérique à ce film qui ne fait que vaciller autour du meurtre, de l’horreur brute, se distrayant de nos frustrations, un peu comme si lorsque lors de votre sortie au mini golf la balle ne faisait que chatouiller le trou sans s’y introduire, vous poussant à retenter de votre chance, accentuant la tension, pour finalement vous y enfoncer et conclure la partie sans révéler la jouissane promise.
C’est un peu la magie, et les défauts, de Pearl, cette volonté de contenir le mal, de vouloir lui échapper alors que tout s’effondre dans le récit, de la pression de la Guerre en Europe jusqu’au porcelet dévoré par les vers sur le porche de la demeure.
L’heure du crime approche et l’attente est insoutenable. Nous attendons la fureur qui ne vient que partiellement et à l’exception d’un extraordinaire monologue faisant soulever l’échine, le frisson reste somme toute faiblard.

Pearl est une œuvre cynique qui de par ses atmosphères nous envoûte, nous conduit dans ce rêve ténébreux, dont les décors ravissent la rétine, où nous souhaitions découvrir les coulisses grinçants et terrifiants de X, où nous espérions découvrir les souterrains d’une ville et d’une jeune femme pleine de secrets, une aventure qui dans la création du personnage aurait finalement dû réussir à nous tétaniser, et ce n’est malheureusement pas de cela qu’il s’agit… mais bien plus d’une ordinaire Origin Story au développement narratif sans saveur mais à l’enveloppe somptueuse et à l’interprétation d’une actrice impressionnante de convictions.
Ti West devient un cinéaste de la forme, confirme son statut de réalisateur des codes, et oublie partiellement son sujet, faisant le minimum pour connecter deux films et offrir un jeu libre à une actrice, sa compagne, qu’il aime éperdument.
Chaque plan respire son amour pour son jeu, ses regards, sa gestuelle.
Chaque plan respire son amour pour le cinéma, et malgré les défauts, cela reste l’immense force de Pearl, l’amour de son créateur.

II) Les caractéristiques techniques de l’édition Blu-Ray

Image :

Le master que propose Universal pour Pearl est remarquable, fourmillant de détails, profitant d’un piqué minutieux et d’une colorimétrie ravissante, si ce n’est hypnotique rendant à la photographie toute son ampleur. La scène d’ouverture tout particulièrement est impressionnante dans son équilibre des coueurs, des contrastes, de la profondeur et des détails. L’hypnose débute et le travail de ti West brille de mille feux.
Rien à redire, profitez !

Note : 10 sur 10.

Son :

Pour l’édition Blu-ray de Pearl quatre langues sont proposées sont proposées : anglais, français, espagnol et italien.
Pour notre part, nous nous sommes uniquement intéressés aux pistes françaises et anglaises.

– Piste Anglaise DTS Digital Surround 5.1 :

La piste en présence est bien équilibrée, assez frontale mais laissant les atmosphères s’aventurer sur tous les canaux et nous enserrer sur la scène arrière. Les voix sont bien définies, de très légères saturations sur certains hurlements finaux sont à noter, donnant presque une légère distorsion, hormis cela, rien à redire.

– Piste Française DTS Digital Surround 5.1 :

Plutôt équilibrée pour une piste française et au constat sensiblement équivalent avec la piste anglaise, tout y est stable, agréable et bien spatialisé, poussant à entrer pleinement dans le film. Reste la barrière du doublage qui fait perdre la finesse de jeu, l’écriture précise des dialogues.

Note : 8 sur 10.

Suppléments :

Universal ne propose aucun suppléments d’un grand intérêt mais deux contenus sympathiques :

Elle Sort De Sa Coquille (11 minutes) :
Retour sur le plateau de tournage entre X et Pearl et la naissance du projet pour ce second film, originellement une farce, entre le réalisateur et Mia Goth, devenue réalité.
Le bonus revient sur la manière dont le personnage de Pearl jeune a été construit, sur quelles bases.

– Un Saut Dans Le Temps (4 minutes) :
Retour en images et comparatif des lieux de X à Pearl et les coulisses de la métamorphose, un voyage dans le temps de six décennies en seulement quelques semaines, résumé en quatre minutes.

Note : 6 sur 10.

Avis Général :

Bien que Pearl soit un sympathique divertissement, avec une esthétique fascinante, nous sommes loin du chef d’œuvre que les campagnes de marketing à travers le monde nous martèlent depuis des mois.
Pearl est en cela une œuvre dans la moyenne haute des réalisations de Ti West qui intrigue et nous porte tout du long avec intérêt, et construisant toujours plus le caractère hypnotique du jeu de Mia Goth , une révélation chez Kino Wombat depuis son passage chez Lars Von Trier, oubliant néanmoins comment développer une intrigue et ses personnages, tout comme cela était le cas dans X.
D’un point de vue technique cette édition Blu-ray est quasiment irréprochable, tant dans l’image que dans le son, nous sommes transportés dans le cadre.
Reste des suppléments assez légers, là où nous aurions préféré un commentaire audio ou des entretiens.

Note : 7.5 sur 10.

Pour découvrir Pearl en Blu-Ray :
https://store.potemkine.fr/dvd/5053083263126-pearl-ti-west/
https://metalunastore.fr/collections/derniers-ajouts/products/pearl-1

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