
| Réalisateur : Damien Leone |
| Acteurs : Lauren Lavera, David Howard Thornton |
| Genre : Horreur |
| Durée : 122 minutes |
| Date de Sortie (salles) : 9 octobre 2024 |
Synopsis : Après avoir survécu au massacre d’Halloween perpétré par Art Le Clown, Sienna et son frère tentent de reconstruire leur vie. Alors que les fêtes de fin d’année approchent, ils s’efforcent de laisser derrière eux les horreurs passées. Cependant, au moment où ils se croyaient enfin à l’abri, Art refait surface, bien décidé à transformer Noël en un véritable cauchemar.
Rigole le Clown, Rigole !
Nous voici cinq ans après le carnaval macabre et hyper-stylisé de Terrifier 2, Halloween est derrière nous, sortez le sapin, le père Noël est en chemin.
Sienna sort de l’hôpital psychiatrique et part vivre chez son oncle.
Jonathan, lui, son petit frère a refoulé les événements passés et tente d’être un étudiant universitaire lambda.
Dans les couloirs de la faculté, de jeunes adultes vouent une fascination morbide au calvaire du jeune homme et sa sœur, certains veulent même en faire les stars d’un podcast.
Art Le Clown et son associée, ancienne victime du premier Terrifier, après une hibernation de cinq années, sortent de leur hibernation damnée.
Dans leurs viseurs, Sienna et sa famille, sur leur chemin, quelques foyers attendant la visite de Santa Claus et des universités pleines d’étudiants écervelés.
Ce nouvel opus réalisé par Damien Leone est un hommage aux slashers dédiés aux périodes hivernales, à l’homme à barbe et aux buffets familiaux tendant à la tripaille.
Dans le patrimoine génétique de ce Terrifier 3 coule le matriciel Black Christmas, le bis Silent Night Deadly Night, le grinçant Christmas Evil et le plus récent, mais non moins pugnace, Better Watch Out.
Le cinéaste continue son exploration du cinéma de genre à tendance 80s et s’amuse follement.

Les reliefs du geste Leone, entre slasher retro et déviances épiques
Le mirage plastique et humoristique est très présent, plutôt plaisant.
Cependant l’histoire, elle, stagne, tout du moins pourrait le laisser paraître pour les néophytes de la licence. Terrifier 3 laisse transparaître le geste d’un cinéaste écartelé entre clin d’oeil cinéphile et volonté de constituer un nouveau mythe.
Ainsi, tout comme pour Terrifier 2, ce troisième volet a été tronçonné en deux blocs, ralentissant le développement narratif.
Dans un premier temps, la phase introductive dure une bonne petite heure, oublie la narration, et s’évade à reconstituer des archétypes horrifiques en poussant les paramètres dans leurs retranchements les plus outranciers.
Dans cet espace de lancement, Leone constitue l’atmosphère de l’opus, tire les tendances, taillade les caricatures et invite le spectateur à profondément s’amuser, rigoler de son macabre et spectaculaire encart grand-guignolesque.
Nous ne sommes plus si loin d’un volet scabreux et dément de Scary Movie allant de la scène de douche hybridant Psychose de Hitchcock et Pulsions de De Palma jusqu’au duel entre glaive et tronçonneuse exhumant le truculent Massacre à La Tronçonneuse 2 de Tobe Hooper, en passant par le grinçant rendez-vous familial d’un certain The Loved Ones réalisé par Sean Byrne.
La pauvreté de la structure pousse dans ces premiers instants, succession de saynètes, d’easter eggs, à s’engouffrer dans la farce ou bien à s’ennuyer terriblement, car rappelons-le Terrifier est un semblant d’errance d’écriture.
Un semblant ? Oui. Car c’est dans un second temps, dans le chaos, que se joue le film.
Damien Leone avance ses pions transformant ces multiples suites en une seule fresque.
Il dégrossit progressivement le caractère grotesque, affine la terreur, et ouvre la carcasse fumante de la dimension fantastique et surnaturel de l’oeuvre.
Le réalisateur nourrit la bête entre constellation familiale et héritage de comic books dégénérés.
Plus la partie progresse et plus se profile un affrontement épique, tendant à faire se croiser le bien et le mal, Dieu et Satan, tendant à faire se croiser deux Etats-Unis, les puritains et les horreurs périphériques de quartiers dévorés par la misère et le crack.
Les souterrains exultent, les créatures s’activent, le défilé ne fait que commencer…

The Ninth Cercle, route vers l’enfer, glaive à la main
Ainsi, les films s’enchaînent, oscillent dans leurs décorums, et font progresser les mécanismes d’une mythologie propre à la filmographie toute entière de Damien Leone.
Un véritable arc narratif se fait sentir, poussant de manière constante les personnages vers une transcendance car ce qui compte au fond de tout cet amas de chair, c’est ce duel titanesque entre Sienna et le mal.
D’ailleurs, plus la progression se précise, et plus Art semble n’être que le bouffon maladroit d’entités souterraines bien plus perfides et voraces.
C’est avec un rapide clin d’oeil à The Ninth Circle, ancien court-métrage du cinéaste, que nous comprenons mieux les reliefs de cette mascarade de sa suite à venir, que les démons et possédés célèbrent pour la venue d’un être supérieur : le diable en personne.

D’œuvre cacophonique à toile impressionniste, le chemin tortueux de la saga Terrifier
Entre slasher de noël et doigt d’honneur au puritanisme américain, et ses motifs christiques, Terrifier 3 sous ses airs de bête stupide ouvre la brèche d’une saga bien plus ample qu’il n’y parait.
Damien Leone affirme son style, certes brinquebalant dans la rythmique globale, mais profondément honnête dans l’amour de l’horreur, des effets plastiques et de la constante surenchère organique.
Ça tripaille sévère, ce troisième opus est une odyssée de la viscère.
Ce n’est d’ailleurs pas pour rien qu’un certain Tom Savini fait son apparition au cours de ce troisième volet, responsable effets spéciaux pour Zombie de Geroge A Romero ou encore Maniac de William Lustig.
Au delà d’être cinéaste, Damien Leone est surtout un farfadet, un artiste plasticien de génie.
Avec Terrifier 3, la saga prend forme, et pour la première fois, il semblerait qu’une épopée slasher ait une véritable consistance d’un volet à l’autre, alors que pourtant pris de manière individuelle, les films sont de cruels vides scénaristiques.
Dans la chair, le sang et les charognes, il nécessite de prendre du recul, observer à nouveau la toile, capturer l’effet impressionniste pour saisir que Leone a bâti une hydre dont Art Le Clown n’est que bouffon sordide masquant des horreurs bien plus profondes.
On s’ennuie parfois dans cette surenchère gore, qui s’étale trop dans sa durée et ses références forcées, mais qu’est ce qu’on rit, tantôt à gorge déployée, tantôt de manière crispée, si ce n’est glacée.


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