Luz, La Fleur Du Mal : Critique et Test Blu-Ray

Réalisateur : Juan Diego Escobar Alzate
Acteurs : Yuri Vargas, Conrado Osorio, Sharon Guzman
Genre : Horreur Folklorique
Durée : 104 minutes
Pays : Colombie
Année de sortie : 2019 (festivals) / 2022 (Blu-Ray)

Synopsis : De nos jours, dans un petit village isolé au milieu des montagnes colombiennes – Une communauté vit comme au Moyen-Âge sous le joug d’un prédicateur nommé El Senor, qui dirige la population d’une main de fer et retient prisonnier un enfant nommé Jesus, censé être le Nouveau Messie.

Dans cette vague de titres marquant la fin de l’année 2022, Le Chat Qui Fume a eu des envies d’exotisme, la volonté de s’éloigner des terres cinégéniques habituelles pour découvrir de nouveaux créateurs, des oeuvres insoupçonnées, pour s’investir toujours plus dans son travail d’exhumateur vidéo tout comme dans sa nouvelle lubie de mettre en lumière des flammes naissantes.

Direction la Colombie, pour Luz, La Fleur Du Mal, première réalisation de Juan Diego Escobar Alzate.
Nous sommes en 2019, sur un plateau de la Cordillière des Andes, éloigné du monde, au coeur d’une communauté aux rites moyenâgeux, aux apparats de secte attendant le retour du messie : Jésus.

Pour cette sortie mettant en avant une réalisation actuelle, Luz : La Fleur Du Diable passe par la case de la belle collection digipack de l’éditeur, comme cela est le cas également pour Achoura, sorti à la même période.

L’article s’organisera en deux temps :

I) La critique de Luz : La Fleur Du Mal

II) Les caractéristiques techniques de l’édition Blu-Ray

I) La critique de Luz : La Fleur Du Mal

Dans les montagnes colombiennes, loin de tous les regards, de toute rencontre, vit une communauté tenue par la poigne terrifiante de El Senor.
Se déroulant de nos jours, mais enfermant les personnages dans un quotidien moyenâgeux, jouant de l’ignorance des habitants pour mener son fanatisme avec talent, le chef de la secte a les pleins pouvoirs, il est envoyé de Dieu et se doit de mener à bien la voix des cieux pour accueillir le nouveau messie.
Il éduque ses trois filles, qu’il élève au statut d’anges, donnant à cette étrange société un émerveillement, un avant-goût du paradis, un fruit défendu, une promesse pour tenir derrière les injonctions à la violence retorses de leur commanditaire.
Un soir, El Senor révèle à sa fille, un talisman, une boîte renfermant le son des enfers, la voix du diable, un lecteur cassette portatif, la jeune fille se prend de fascination pour l’objet, le vole tandis que dehors dans le froid un jeune homme est attaché, devant prouver ses hypothétiques vertus messianiques, sur le lit d’os de ses prédécesseurs morts de faim et de froid.
Le messie ne pointe toujours pas le bout de son nez, les soumis à l’ordre commencent à remettre en doute les promesses, les ténèbres encerclent les habitations de fortune, dans les bois, un enregistrement résonne ouvrant les portes à une hystérie ambiante, les anges saignent, le monde s’effondre.
Le chaos se dessine, prépare-t’il l’arrivée du tout puissant, ou bien plutôt du diable en personne.

Juan Diego Escobar Alzate, pour son premier film, se dirige vers un courant aujourd’hui plein de vitalité celui du folk-horror, sous-genre du cinéma d’horreur qui a connu le devant de la scène avec The Wicker Man et The Devils, dans les années 70.
Aujourd’hui le sous-genre vit une renaissance avec la sortie de films tels que Midsommar, The VVitch.
Des films qui ont su travailler le patrimoine folklorique de leurs espaces géographiques, faisant ressortir la tradition pour la confronter à nos modèles de vie modernes.
Le film nous saisit dès sa séquence introductive, nous nous amusons à trouver tout un fatras de références allant de The VVitch jusqu’au cinéma d’Alejandro Jodorowsky. Nous sommes envoyés dès les premières images au coeur de film, au coeur de l’intrigue. Le cinéaste parvient en quelques minutes à structurer son intrigue, son espace, ses personnages, à jouer de contraste entre lumineux temps d’érotisme volés et austérité d’une violence glaciale.
Tout un ordre prend vie face à nous, laissant voir les hiérarchies, la place de tout un chacun, esquissant assez de pistes pour éveiller l’intérêt, se questionner et déjà se propulser dans un récit foisonnant, creusant une mythologie que nous espérons découvrir.
Une poésie ambiante se forme et les interprétations débutent dans nos imaginaires jusqu’à ce que finalement nous nous rendions compte d’un soucis, Juan Diego Escobar Alzate a conçu un univers complexe qu’il ne parvient pas véritablement à piloter et où l’illusion visuelle des premières minutes, nos fantasmes nous guident vers une oeuvre brouillonne qui ne sait comment sortir de ses hommages, qui ne sait comment tendre un propos original, se cachant alors vers un travail métaphysique qui lui échappe et se conclut par une séquence intéressante mais qui ne parvient à être nourri par le corps décharné du film dans sa globalité.

Le réalisateur travaille énormément, trop, son esthétisme pour faire ressentir une atmosphère héritée de ce mouvement cinématographique d’horreur à tendance folklorique, et ne s’approche finalement jamais des films de Robert Eggers ou Ari Aster.
Le réalisateur colombien se créé un univers visuel trouble jouant fortement sur une stylisation très appuyée, retro, apportant une identité singulière au film tant les couleurs sont saturées et le grain palpable mais qui empiète grandement sur l’intrigue du film, interrogeant la dynamique narrative du spectacle en jeu.
Les acteurs, eux sont convaincants, mais semblent, tout comme nous, attendre une avancée, un subrepticement, pour ouvrir la pensée, pour nous pousser à interpréter.

Luz, La Fleur Du Mal est en cela un spectacle brouillon qui se cache derrière un esthétisme retro léché, parfois trop, risquant la dimension Grindhouse, qui nous promet tant, qui réussit à mettre tout un monde sur pied pour finalement le regarder se déliter.
Nous en attendions certainement trop.

Note Film :

Note : 3.5 sur 10.

II) Les caractéristiques techniques de l’édition Blu-Ray

Image :

Le master Blu-Ray en présence est exemplaire lorsqu’il s’agit de retransmettre le travail de l’image voulu par le réalisateur.
Le niveau de détails est remarquable et la saturation des couleurs donne l’impression de découvrir un film sous acides, ouvrant des perceptions singulières aux différents cadrages, travaillant notre manière de lire l’image.
De même le grain appuyé ainsi que les rayures artificiels plairont à certains, comme laisseront de marbre d’autres, nous faisons partis de la seconde équipe.

Le Chat Qui Fume propose en tout cas un très beau master HD, rien à redire.

Note Image :

Note : 9 sur 10.

Son :

Une unique piste est proposée Espagnol DTS-HD MA 5.1 -bien que le digipack mentionne 2.0- cette dernière est assez riche, jouant de nouveau sur le caractère retro dans la manière de travailler les fréquences.
C’est très certainement de la piste son que l’hypnose, à certains moments, est rendue possible, les fréquences nous happent, nous portent vers une contrée mystique fascinante.
L’équilibre entre voix, bande-originale et ambiance sonore est très bien calibré.

Note son :

Note : 9 sur 10.

Suppléments :

Le Chat Qui Fume nous a concocté une édition particulièrement bien étoffée en matière de suppléments :

• Making of du film (58 min) :

Armé d’un téléphone, rappelant l’image crue et saturée des MiniDV, nous suivons le réalisateur sur le quotidien du tournage, allons au-delà des paysages, à la rencontre des acteurs et techniciens, avec une dynamique investigatrice passionnante.
Le cinéaste trouve un moyen de parfaitement saisir notre attention et nous fait pénétrer totalement sur le plateau, donnant envie de réexplorer le film, lui redonner une chance, tant la forme ici, sert le fond, contrairement au film.
Il nous guide dans le processus créatif de l’oeuvre, la naissance de l’image. Génial.

• L’expérience Sitges (49 min) :

Toujours en usant du même format que pour le making-of, le réalisateur arpente le festival de Sitges, festival fantastique international majeur, où le film était présenté.
La caméra à la main et l’image quasi mystique du document en présence nous capte tout du long, nous faisant réellement plonger dans le quotidien du festival et le parcours de Luz, La Fleur Du Mal, de sa séance officielle, aux échos de ce dernier à travers une ville métamorphosée le temps d’une dizaine de jours.
Ne manquez pas ces déambulations, cet artefact, qui montre le parcours d’un film qui a vécu bien des aventures avant de se retrouver sur notre petit disque, à divertir nos soirées, nos trognes, lorsque nous sommes avachis sur nos canapés après une journée de travail.

• Musique du film (46 min)

• Clip vidéo: The Scum – Dead Eyes :

Clip réalisé par le cinéaste pour le groupe de Death Metal The Scum.
Nous retrouvons dans la mise en scène des mécaniques et organisations du cadre semblables à Luz, La Fleur Du Mal. Il est possible de vivre le clip comme un court-métrage horrifique assez direct, ne reculant pas face à l’hémoglobine et capable d’une frontalité que finalement Luz a égaré tout au long de sa proposition.

• Film annonce

Note Suppléments :

Note : 9 sur 10.

Avis général :

Bien que le film, plein de promesses, tant de par le sujet traité, le fanatisme religieux et les communautés sectaires, que par la forme désirée, Folk-Horror retro, ne parvienne pas à trouver sa stabilité entre scènes éprouvantes et contemplations, ne s’engageant jamais ni dans l’un, ni dans l’autre, nous sommes ici face à une très belle édition, qui donne envie de redécouvrir, aimer le film.
Les masters à la fois son et image ont un très bon rendu, parfaitement calibrés pour porter la vision artistique du cinéaste, donner à ses saturations une force visuelle fascinante, hypnotique.
Concernant les suppléments, Juan Diego Escobar Alzate offre des contenus additionnels tout autant euphorisants qu’ensorcelants jouant sur la forme des propositions, nous attirant tout autant au coeur de la création de Luz, La Fleur Du Mal que dans la naissance du film au festival de Sitges.

Le Chat Qui Fume continue à explorer des cinémas peu représentés, en prenant la direction de réalisations modernes.
L’éditeur ouvre un paysage que nous n’espérions pas, joue de nos curiosités pour explorer des expressions visuelles nouvelles, et ce, toujours, en nous offrant un travail éditorial exemplaire.

Avis global :

Note : 7 sur 10.

Pour découvrir Luz, La Fleur Du Mal en Blu-Ray :

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